Le présent entretien n’avait pour but de démontrer le bien ou le mal de la pensée de Freitag, mais simplement de souligner quelques liens entre l’existence de sa pensée et d’autres phénomènes pertinents survenus durant l’Histoire. Le professeur J. Ablan de l’Université de Nice élabora il y a quelques temps sa théorie des réseaux – en reprenant Castells – mais l’appliqua à ce qui est convenu de nommer, depuis Prigogine et Stengers, le désordre. Le principe est de prendre, comme on cuillerait des fleurs à la va-vite, des phénomènes en apparence éloignés pour les relier. Ainsi le choix des thèmes du titre était-il laissé à l’entière discrétion de notre interlocuteur.
Pourquoi, mr. Ablan, le choix de Vénus pour tester votre hypothèse?
Vénus, l’archétype astro-physique de la Femme, m’apparaît fondamental dans une étude de la Conscience universelle telle que j’essaie de la faire. Si Vénus, nommée ainsi par les Romains, n’avait pas été ainsi nommée par les Romains, le fondement de même de notre civilisation – dichotomie entre homme et femmes – n’aurait certes pas été le même. Or, contre Mercure ou encore Mars, Vénus reste un système ouvert, et ce même au sein d’une dynamique astro-physique vraiment compétitive (oui, les planètes bougent). Voilà pourquoi ce choix, qui sera validé plus loin je l’espère.
Et Robinson, là-dedans?
Vendredi, l’indigène soumis, est encore une figure-type fondamentale dans l’iconographie colonialiste et post-colonialiste. Fanon a mentionné la chose, il est impossible de ne pas souligner l’importance extrême de la relation entre Robinson et Vendredi pour les rapports
géopolitiques du système-monde des 18e et 19e siècles. Si les économistes des Lumières se servirent de cette fable pour justifier la recherche de profit et l’entrepreneurship, c’est tout autrement lorsqu’on parle de social-démocratie. Ce dernier système vient contredire l’idée même de Vendredi en tant que concept heuristique, et sapant la belle relation de confiance établie dans le mythe entre l’Anglais et l’indigène.
Je ne vois pas où vous voulez en venir…
C’est très simple : Michel Freitag, ses adeptes vous le diront, a comme nom de famille Freitag. Traduit de l’Allemand, ce morphème veut dire Vendredi. Vendredi est un mot tiré du latin, donc de la même racine que Vénus. Il y a assurément une unité cosmologique et une intégration verticale entre ces niveaux du réel : d’abord l’Univers, puis le mythe et enfin l’homme. La pensée du penseur Michel Freitag vient s’insérer dans ces trois niveaux à la fois, sous prétexte d’une métaphysique des états sociaux qui est néanmoins très utile pour digérer le concept quasi-théologique que je vous présente ici. Finalement, ce qu’il convient de faire est un rapprochement, sur la bases des essences ci-haut nommées, avec une véritable prédiction du social, une science prédictive qui permettrait aux gestionnaires d’orienter les politiques publiques dans un sens vraiment légitime. La crise du politique et le désenchantement du monde ne sont que de pâles expressions pour masquer ce qui se cache réellement sous le tapis : une véritable révolution de la pensée, basée sur l’être multi-directionnel du Vendredi (de Vénus ou de Freitag, c’est selon, car c’est la même chose). La formule est vérifiable : prenez trois phénomènes en l’apparence désunis, reliez-les et vous arriverez au constat suivant : tout est relié. Il n’y a qu’un pas pour affirmer ceci : tout est la même chose. Je demande aux intellectuels de notre époque de se lever pour affirmer haut et fort cette métaphysique de l’Unique. Nous aurons Vénus comme étendard.
Merci, professeur, j’espère que nos débats vous aurons plu.
C’est moi qui vous remercie.
Nota : Cet article a été publié dans le bi-mensuel Des plumes et des mots édition du 15 mai 2006, Antibes, France.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire